Ukraine – Après 1 000 jours de guerre, « les gens sont fatigués, très effrayés et sans espoir », dit un prêtre

Malgré le danger, le père Lucas Perozzi, prêtre missionnaire brésilien (photo), est resté en Ukraine depuis le début de la guerre. Il remercie l’Aide à l’Église en Détresse (AED) pour l’aide qu’elle continue à apporter et reste déterminé à annoncer l’Évangile.

Le père Lucas Perozzi s’est retrouvé en Ukraine lorsque la Russie a commencé son invasion à grande échelle dans le pays, en 2022. Cependant, plutôt que de fuir vers son pays natal, le Brésil, il est resté dans le pays pour continuer à exercer son ministère à Kiev auprès de ses fidèles qui, selon lui, montrent des signes d’épuisement après plus de 1 000 jours de conflit.

« Nous nous endormons au son des sirènes et nous nous réveillons au son des sirènes et des bombardements. Les sirènes retentissent sans arrêt. Psychologiquement, les gens sont fatigués, très effrayés et sans espoir. Et puis, il y a aussi le problème de la crise économique. Les choses sont de plus en plus chères; c’est une situation très difficile », explique le prêtre à l’Aide à l’Église en Détresse (AED).

Procession durant les Jours saints 2024

La conséquence de cet état d’esprit, c’est qu’après des mois de panique à chaque fois que les sirènes retentissaient, les gens ont développé une attitude plus insouciante, à leurs risques et périls. « Vous ne pouvez pas vivre comme cela. Pendant les six premiers mois, nous avions l’habitude de courir vers les bunkers, mais ce n’est plus le cas. Quand notre heure viendra, elle viendra. Dieu seul connaît l’heure. Il peut s’agir d’un missile ou d’une crise cardiaque. Dieu est le Seigneur de la vie. C’est la réalité, et nous avons fini par l’accepter », explique-t-il.

Le père Perozzi s’est également retrouvé récemment dans une situation difficile, alors qu’il avait décidé d’aller se promener une nuit pour se vider la tête. « J’étais fatigué et je suis sorti un peu pour me détendre avant d’aller me coucher, quand il y a eu une attaque de drones », raconte-t-il à l’AED. « À ce moment-là, la défense aérienne s’est activée et a commencé à détruire les drones, et j’ai été témoin de tout cela. Soudain, j’ai remarqué que des morceaux de missiles anti-drones tombaient autour de moi, comme de la pluie. J’entendais de gros morceaux de métal se briser sur le sol. J’ai pensé : “Pour l’amour du ciel, j’ai survécu à cette guerre pendant si longtemps, et maintenant je vais mourir de quelque chose d’aussi stupide que ça ?” J’ai couru, les mains sur la tête, et j’ai réussi à rentrer chez moi sans être touché. »

Malgré l’épuisement général dû à la guerre, le père Perozzi reste déterminé à poursuivre sa mission, même si elle est de plus en plus difficile à mener à bien. « Notre mission est de répandre l’Évangile, mais ce n’est pas facile. Les gens ont besoin d’espoir, ils ont besoin de Dieu, du sacré. Plus rien ne les console. Ils ont renoncé à chercher. Ils sont devenus apathiques, désabusés. »

Le père Lucas durant une actvité avec des jeunes.

L’un des rares points positifs de cette situation a été l’aide fournie par l’AED, qui continue de soutenir l’Église catholique locale en Ukraine. « Toutes les paroisses ont reçu de l’aide pour organiser des camps d’été pour les enfants, ce qui est très important, car ils vivent dans un état d’alerte permanent. C’est un stress constant, et cela conduit à des bagarres entre eux. Il est donc important de les sortir de cette atmosphère. Dans ma paroisse, nous avons organisé un camp dans les montagnes, où il n’y a pas de sirènes de raid aérien, pas de missiles, et où les enfants peuvent se reposer et jouer, se parler entre eux, où nous pouvons leur apporter un accompagnement pastoral, comme des messes et des catéchèses. »

Un autre aspect central de la mission de l’Église en cette période de guerre est la fourniture de soins aux victimes traumatisées, ce qui nécessite une formation spécifique, que l’AED contribue à fournir.

« Nous devons être qualifiés pour pouvoir travailler avec des gens qui étaient sur la ligne de front, avec des parents qui ont perdu leurs enfants, des enfants qui ont perdu leurs parents. Tout ce qui est lié à des traumatismes, ce qui n’est pas facile. Il s’agit d’un nouveau domaine pour nous. Mais nous faisons tout avec gratitude. Je suis content de ma mission et prêt à la mener à bien. Tant que nous sommes en vie, nous avons la mission de proclamer l’Évangile ! », conclut le père Perozzi.

Le père Lucas durant une homélie avec des jeunes.