Pakistan : les chefs de l’Église se félicitent du changement de l’âge minimum du mariage

Une réforme de la loi sur le mariage chrétien fixe l’âge minimum du mariage à 18 ans. Bien qu’il ne s’agisse que d’une première étape, cela pourrait simplifier la lutte contre les cas d’enlèvement et de mariage forcé de jeunes filles chrétiennes dans le pays.

L’Église catholique au Pakistan s’est félicitée de la promulgation d’un amendement à la loi sur le mariage chrétien, qui porte l’âge du mariage à 18 ans aussi bien pour les garçons que pour les filles.

En 2021, Farah Shaheen, une jeune chrétienne de Faisalabad âgée de 12 ans, a retrouvé sa famille après un cauchemar de cinq mois. Elle a été enlevée, mariée de force et convertie. Elle a été réduite en esclavage sexuel, contrainte de travailler de longues heures, de nettoyer des excréments d’animaux dans la cour de son ravisseur et d’avoir les chevilles entravées. Sur la photo, Farah à l’avant plan, célèbre sa libération avec sa famille.

Bien que sa portée soit limitée — la loi ne s’applique qu’aux chrétiens résidant sur le territoire de la capitale Islamabad — les responsables de l’Église espèrent que ce sera la première étape d’un plan global visant à freiner le mariage des enfants et, en particulier, l’enlèvement et la conversion forcée de jeunes filles issues de minorités.  

« Souvent, lorsque des filles sont enlevées, elles peuvent être facilement mariées, parce qu’elles sont emmenées dans un endroit où l’âge légal du mariage est de 16 ans, ou parfois les musulmans peuvent simplement dire qu’elles sont déjà en âge de se marier. Mais nous, chrétiens, disons qu’elles ne devraient pas se marier du tout avant l’âge de 18 ans, parce qu’elles sont encore des enfants », explique Mgr Samson Shukardin, actuel président de la Conférence épiscopale pakistanaise, à l’œuvre pontificale catholique Aide à l’Église en Détresse (AED).

« Cela nous donnera un peu de tranquillité d’esprit ; pas une sérénité totale, mais une certaine tranquillité d’esprit. Au moins, dans ces conditions, nous avons une base légale permettant d’entamer une procédure contre ces personnes qui ont enlevé et épousé des jeunes de moins de 18 ans », a-t-il déclaré à l’AED à propos de la nouvelle loi.

Au Pakistan, l’enlèvement, la conversion forcée et le mariage d’enfants constituent un grave problème auquel les autorités civiles n’ont pas encore apporté une réponse satisfaisante. « Le problème est là, il y a des enlèvements et des conversions, et nous avons élevé la voix à plusieurs reprises, mais peu de choses ont été faites jusqu’à présent », déclare Mgr Shukardin.

L’Église espère bien poursuivre cette bataille en tentant de porter l’âge du mariage à 18 ans pour tous les Pakistanais, quel que soit leur religion ou leur lieu de résidence. Les évêques estiment qu’un succès dans cette lutte rendrait la libération des victimes d’enlèvement et de mariage forcés beaucoup plus aisée.

À Karachi, au Pakistan, le 24 octobre 2020, une manifestation a été organisée par les citoyens. Chrétiens, hindous et musulmans se sont rassemblés au Karachi Press Club. Les personnes présentes ont déploré un nouvel épisode de violence à l’encontre d’une jeune fille chrétienne. En effet, au matin du 13 octobre 2020, Arzoo Raja est sortie faire des achats et n’est jamais revenue. Elle a été kidnappée, convertie à l’islam et a épousé son ravisseur, un musulman de 44 ans. La manifestation a été organisée et dirigée par le Comité national pour la paix, Interfaith Harmony (Harmonie intercroyance), en collaboration avec d’autres groupes de la société civile et des partis politiques qui défendent les droits de l’homme. Les manifestants ont scandé des slogans en faveur du retour de la jeune fille dans sa famille et de punir les ravisseurs. Ils ont également demandé l’intervention des autorités pour l’enlèvement et la conversion forcée d’Arzoo.

Dans une déclaration commune envoyée à l’AED par la Commission nationale Justice et Paix, les responsables catholiques remercient le parlement d’Islamabad d’avoir adopté le projet de loi à l’unanimité. « Cette loi jouera un rôle crucial dans la protection de nos jeunes filles mineures contre les conversions et les mariages forcés. Nous espérons que le gouvernement prendra d’autres mesures pour criminaliser les conversions forcées. »

Par son travail de sensibilisation, l’œuvre pontificale attire depuis longtemps l’attention sur le problème de l’enlèvement et de la conversion forcée de jeunes filles chrétiennes, et félicite l’Église catholique pakistanaise et le gouvernement pakistanais pour ce petit, mais important pas en avant. « Avec les évêques, nous reconnaissons qu’il reste encore beaucoup à faire pour résoudre pleinement ce problème, mais toute action visant à mettre fin au traumatisme des jeunes filles enlevées, abusées sexuellement puis forcées de renoncer à leur foi et d’épouser leur ravisseur doit être saluée », a déclaré Mark von Riedemann, directeur des affaires publiques et de la liberté religieuse de l’AED.

Pour plus d’informations sur l’enlèvement, la conversion forcée et le mariage forcé de filles chrétiennes dans le monde, notamment au Pakistan, consultez le rapport « Entendez ses pleurs », produit par le bureau britannique de l’AED en 2021, et traduit en français par le bureau canadien de l’Aide à l’Église en Détresse (AED).